Prix de l’AHJUCAF 2023 : Mention spéciale attribuée à Youmna Makhlouf pour sa thèse sur l'identité de la personne en droit libanais

4 juillet 2023

Le prix de l’AHJUCAF (Association des hautes juridictions de cassation ayant en partage l’usage du français) organisé chaque année, récompense l’auteur d’un ouvrage, d’une thèse ou d’une recherche, écrit ou traduit en français, sur une thématique juridique ou judiciaire, intéressant le fond du droit ou les missions, l’activité, la jurisprudence, l’histoire d’une ou de plusieurs hautes juridictions membres de l’AHJUCAF.

L’objectif prioritaire du prix de l’AHJUCAF est d’identifier et de promouvoir de jeunes juristes d’avenir de pays en voie de développement, ayant réalisé des travaux de qualité, et de soutenir la recherche juridique universitaire sur les thématiques intéressant les Cours suprêmes francophones.

Le jury de l’édition 2023 du Prix de l’AHJUCAF pour la promotion du droit s'est réuni le 29 juin 2023 à la Cour supérieure de justice de Luxembourg. Parmi 23 dossiers de qualité émanant de candidats originaires de 12 pays différents, ceux de M. Abdramane Traoré (Mali) et de Mme Youmna Makhlouf (Liban) se sont dégagés.

Le jury a attribué à l’unanimité une mention spéciale à Mme Youmna Makhlouf pour sa thèse : « L'identité de la personne en droit libanais. Étude de droit privé », réalisée à l’Université Paris II Panthéon-Assas sous la direction de Mme le professeur Léna Gannagé, soutenue à Paris le 16 décembre 2021. 

Mme Makhlouf a obtenu un master 1 de droit privé à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (Liban) puis un master 2 à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.  

Elle est avocat, maître de conférences à la Faculté de droit et des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth et chercheur associé au Centre d'études des droits du monde arabe. Elle est l'auteur de nombreuses publications.

 

Résumé de la thèse de Mme Youmna Makhlouf : « L'identité de la personne en droit libanais. Étude de droit privé »

L’identité de la personne en droit libanais désigne tout d’abord l’identité civile, synonyme d’identification et d’individualisation de la personne. Mais cette identité a toujours intégré un élément supplémentaire fondé sur l’identité communautaire (c’est-à-dire l’appartenance à une communauté religieuse) qui révèle les rapports complexes entretenus entre l’individu et le groupe. 
Cette dualité des identités impose de préciser la nature des rapports qu’elles entretiennent. Les interactions entre ces identités multiples sont parfois paisibles. Mais leurs relations sont souvent conflictuelles, notamment lorsque l’identité individuelle est aux prises avec l’identité collective. 
L’identité communautaire reconnue provoque ainsi nécessairement des frictions dès lors qu’elle s’impose dans certaines circonstances à la personne qui cherche à s’en libérer. Imprégnée d’une logique communautaire et particulariste, l’identité communautaire s’oppose à une identité universaliste, relayée par les droits fondamentaux et se définissant par une logique individuelle indépendante des différences religieuses. Les communautés religieuses adoptent parfois des pratiques qui contredisent les droits que l’individu tire de sa qualité de citoyen. Dans cette perspective, la recherche des voies de la coexistence entre les différentes identités s’impose. Ces voies se sont fondées jusqu’à présent sur la volonté individuelle. L’individu qui ne s’aligne pas sur les pratiques du groupe devrait ainsi avoir le droit de sortir de sa communauté religieuse ou de recourir à des actes juridiques afin d’échapper aux contraintes qui pourraient résulter de l’application des droits religieux. Cette voie reste toutefois insuffisante. Outre les critiques qui peuvent être adressées à ses fondements, elle repose sur l’illusion d’une volonté abstraite et puissante dont l’effectivité est toutefois démentie par le poids de la réalité sociologique. Le recours à la volonté individuelle s’accompagne ainsi d’un coût qui n’est pas à la portée de tous les individus. C’est dans cette perspective que l’intervention de l’État s’impose. Cette intervention sera ainsi précisée à la lumière du principe de neutralité de l’État tel qu’il découle de l’article 9 de la Constitution libanaise.