Découvert par Pierre Montet en février 1922, au sein d’un ensemble de neuf tombes de la nécropole royale de Byblos, le sarcophage du roi Ahirom a suscité, depuis lors, l’intérêt du monde scientifique et du public national et international.
L’importance de ce sarcophage réside non seulement dans les reliefs qui recouvrent ses quatre faces, mais surtout par la présence d’une inscription phénicienne qui débute sur la cuve latérale droite et se poursuit le long côté du couvercle. La partie inférieure du sarcophage d’Ahirom repose sur quatre lions couchés, sculptés en bas-relief, tandis que se détachent, en ronde-bosse les têtes des félins aux angles.
La face antérieure du sarcophage présente une scène de banquet funéraire où apparaît le roi Ahirom assis sur un trône flanqué de sphinx ailés, les pieds posés sur un marchepied. Il est vêtu d’une longue robe, tient une coupe de la main droite et une fleur de lotus fanée de la main gauche. Face à lui, et devant une table chargée de nourriture, s’avance une procession de sept personnages. Certains portent des offrandes, tandis que d’autres ont les bras levés en signe de vénération. Sur la face postérieure du sarcophage s’avance une file de personnages qui confère une solennité à la scène, portant eux aussi des offrandes et conduisant une chèvre. Sur chacune des faces latérales, quatre femmes à la poitrine nue, les bras levés ou les mains jointes au niveau de la taille, semblent se lamenter. Une frise de fleurs de lotus renversées court le long de la partie supérieure de la cuve du sarcophage.
Le couvercle de forme légèrement bombé, porte la représentation de deux personnages barbus, qui se font face de part et d’autre de deux lions dont les têtes forment les tenons du sarcophage. L’un des personnages, le roi Ahirom tient une fleur de lotus tombante et lève la main libre en signe de bénédiction. L’autre, probablement son fils, hume une fleur de lotus et tient de la main droite un vase de libation.
L’inscription funéraire, en caractères phéniciens débute sur la face latérale droite de la cuve (1) et se poursuit sur le couvercle (2), au-dessus de la face antérieure. On y lit, de droite à gauche :
1- « Sarcophage qu’a fait Ittobaal fils d’Ahirom, roi de Goubal (Byblos) pour son père Ahirom, lorsqu’il l’a placé pour l’éternité. »
2- « Et si un roi parmi les rois, ou un gouverneur parmi les gouverneurs, ou un chef d’armée monte à Goubal et ouvre ce sarcophage-ci, que le sceptre de son pouvoir soit flétri, que son trône royal soit renversé et que la paix s’enfuie de Goubal. Et, quant à lui, que son inscription soit effacée « à la face de Goubal » ».
(Lecture H., Sader, Liban l’autre Rive, 1998, p. 126).
Cette inscription datée du Xe siècle av. J.-C., est le premier exemple le plus complet de l’alphabet phénicien. En effet, dix-neuf des vingt-deux lettres y sont gravées témoignant de l’aboutissement de l’élaboration de cet alphabet au cours du IIe millénaire av. J.-C.
Le sarcophage et l’inscription ont suscité un grand intérêt lors de sa découverte, et furent publiés notamment par René Dussaud en 1924 (Syria, vol. V,1924, pp. 135-157), puis Ch. Torrey (JAOS, 45, 1925, pp. 269-279), pour ne citer que ceux-ci.
À la suite de sa découverte, l'objet fut présenté dans un musée temporaire situé au centre-ville de Beyrouth, le Musée national Libanais où seules les antiquités mises au jour à Byblos étaient exposées. Placé au centre de la salle 2, dénommée "Salle de l’alphabet", il en constituait la pièce maîtresse. À partir de 1937, il fut transféré au sous-sol du Musée national, avant d’être installé de manière permanente au rez-de-chaussée de l’établissement.
Bibliographie : R. Dussaud, « Les inscriptions phéniciennes du tombeau d'Ahiram roi de Byblos », Syria, vol. 5, no 2, 1924, p. 135-157 ; Ch. C. Torrey, « The Ahiram Inscription of Byblos », Journal of the American Oriental Society, vol. 45, 1925, p. 269–279 ; P. Montet, Byblos et l'Égypte, quatre campagnes des fouilles 1921-1924, Paris, Terre du Liban, 1928 ; G. E. Markoe, « The Emergence of Phoenician Art », Bulletin of the American Schools of Oriental Research, vol. 279, no 279, 1990, p. 13–26 ; Collectif, Institut du monde arabe, Liban, l'Autre rive, Paris, Flammarion, Paris, 1998, p. 126 ; Reinhard G. Lehmann, Die Inschrift(en) des Ahirom-Sarkophags und die Schachtinschrift des Grabes V in Jbeil (Byblos), Mayence, Zabern, 2005 ; A.-M. Maïla Afeiche, Le Guide du Musée national de Beyrouth, 2020, p. 32-37.