Hommage du Pr Victor Jebara au Dr Antoine Sarkis, figure de la médecine libanaise

Le meilleur d’entre nous
Jeudi 11 septembre 2025

OLJ / Par Professeur Victor JEBARA, le 11 septembre 2025 ​

Il est des hommes dont l’élégance intellectuelle et humaine laisse une empreinte indélébile. Aujourd’hui, nous pleurons la perte d’un ami, d’un collègue, d’un maître, d’un frère. Un homme rare.

Depuis toujours, il brillait. Major au baccalauréat libanais, puis major de promotion à la faculté de médecine, il avait cette intelligence limpide, naturelle, sans effort apparent, qui impressionnait sans jamais écraser. Il était de ceux dont l’excellence ne servait jamais à dominer, mais à élever – les idées, les autres, les causes justes. Ce don, il en a fait un outil de service, jamais d’orgueil.

Cardiologue d’exception, il exerçait son métier avec une rigueur scientifique irréprochable et une humanité désarmante. Ses patients trouvaient en lui un médecin compétent, bien sûr, mais aussi un allié, un confident, une présence. Il ne soignait pas des cœurs, il les comprenait. Il n’écoutait pas des plaintes, il entendait des vies.

À la tête de l’Association franco-libanaise de cardiologie, puis de la Société libanaise de cardiologie, il a su conjuguer exigence, innovation et élégance dans un monde souvent marqué par les ego. À la faculté de médecine de l’Université Saint-Joseph, où il enseignait, il a formé des générations entières de médecins, transmettant avec passion non seulement un savoir, mais une manière d’être médecin. Il incarnait l’exemple.

La vie, pourtant, ne l’a pas épargné. Il y a dix-huit mois, il perdait son épouse bien-aimée, emportée par la maladie. Ce chagrin, immense, il l’a porté avec une dignité bouleversante, trouvant dans l’amour inconditionnel qu’il portait à ses filles – Anne-Sophie, Valérie et Stéphanie – la force de continuer, sans jamais se plaindre.

Et puis la maladie est venue le frapper à son tour. Longue, injuste, douloureuse. Mais fidèle à lui-même, il l’a affrontée avec courage, lucidité et retenue. Jamais une plainte, jamais de colère, juste cette lumière dans le regard, ce calme dans la voix et cette fidélité à ses valeurs jusqu’au bout.

Il était discret, droit, d’une fidélité absolue en amitié comme en convictions. Il ne cherchait ni lumière ni reconnaissance : elles le suivaient, simplement, parce que son talent, sa bonté, sa vérité les attiraient naturellement.

Aujourd’hui, c’est un pilier qui s’effondre. Un modèle qui s’éteint. Une voix qui se tait. Mais ce qu’il a donné, transmis, incarné, vivra longtemps en nous.

Il était, et il restera, le meilleur d’entre nous.