L’Institut d’Études Scéniques, Audiovisuelles et Cinématographiques (IESAV) de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ) a le plaisir de mettre en lumière la participation de Pr Marianne Noujaim à l’Agora de la conférence internationale intitulée “The Prism of Festivals in Theatre Performance and Performance Studies”, qui aura lieu en ligne, le jeudi 11 décembre 2025 entre 16h00 et 19h00.
Professeure en études théâtrales à l’IESAV et coordinatrice académique du Département de théâtre, Pr Noujaim est titulaire d’un doctorat en arts du spectacle (Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3). Ses recherches portent principalement sur l’écriture dramatique et la dramaturgie contemporaines, ainsi que sur les questions de mémoire et d’archives dans le théâtre libanais. Elle codirige par ailleurs le projet de recherche PHC CEDRE “Archives of Theatre in Lebanon: Digitization and Historiography (L-MASRAH)”, et est l’autrice de nombreux articles et chapitres d’ouvrages, ainsi que d’une monographie consacrée à Michel Vinaver. Invitée l’an dernier comme professeure invitée à l’EHESS (Paris), elle assure également la gestion éditoriale de la revue scientifique Regards.
À propos de l’intervention de Pr Noujaim: Le Festival International de Baalbeck et “l’émergence du théâtre libanais”
Lors de cette conférence, Marianne Noujaim présentera une communication consacrée à l’impact du Festival International de Baalbeck (FIB) sur le développement du théâtre moderne au Liban. Fondé en 1956 sous l’égide de Camille et Zalfa Chamoun et géré par un comité indépendant – à une époque où le ministère de la Culture n’existait pas encore –, le festival s’est positionné comme un acteur structurant de la vie culturelle libanaise. S’appuyant sur des archives de théâtre et sur les historiographies du festival et du théâtre libanais, Marianne Noujaim analyse la manière dont le festival a contribué à la création, la professionnalisation et l’autonomisation d’un « théâtre d’art » libanais, distinct des performances folkloriques traditionnelles. Un « comité du théâtre arabe » (ou « comité du théâtre moderne ») est spécifiquement désigné par le comité exécutif du FIB à cet effet et réussit, en effet, à insuffler une dynamique et une synergie nouvelles touchant l’ensemble des acteurs de ce champ : metteur en scène (Mounir Abou Debs) et actrices et acteurs de l’École et de la Troupe du théâtre moderne rattachés au FIB, critiques de théâtre, auteurs dramatiques, poètes et traducteurs, artistes visuels, sponsors publics et privés, public, etc.
Néanmoins, si un effort considérable est déployé pour décentraliser les spectacles de la Troupe du théâtre moderne, ces derniers demeurent presque absents de la grand-messe du festival de Baalbeck lui-même. Par ailleurs, le capital symbolique du festival est remis en question au sein même du champ naissant du au Liban, dont plusieurs voix cherchent à se détacher de la forme et du souffle occidentaux imposés au théâtre libanais. En effet, au tournant des années 60-70, un double facteur fait vaciller l’orientation donnée par le festival au théâtre libanais moderne : un changement mondial et régional des esthétiques théâtrales ainsi qu’un vent de contestation sociopolitique né à la fois de mouvements postcoloniaux et des répercussions de la Guerre des Six Jours sur la scène intellectuelle arabe. Ces facteurs sont reflétés par les parcours de nouvelles troupes libanaises montantes, qui se forgent une popularité et une légitimité en marge du festival.
Celui-ci est amené de ce fait à réviser sa politique culturelle vis-à-vis du théâtre, qui fait office d’enfant choyé du festival, aux côtés du folklore libanais. Alors même que les performances libanaises demeurent exclues du festival qui continuait d’accueillir des spectacles classiques ou expérimentaux de troupes internationales confirmées, un nouvel espace est aménagé à Beyrouth grâce au comité du théâtre arabe, ouvert à diverses voies, du théâtre politique au théâtre pour enfants, et à diverses expériences théâtrales au Liban et à l’étranger.
Les historiographies du festival ainsi que la monographie colossale et fondamentale de Khalida Saïd sur le mouvement théâtral au Liban entre 1960-1975, commissionnée et publiée par le comité du FIB, permettent de discerner la relation privilégiée mais ambiguë entre le festival et le théâtre libanais. Une comparaison entre ces ouvrages et des archives théâtrales de l’époque (1960-1975) souligne les caractères fondateurs et problématiques de ce rapport.
Une contribution académique majeure
À travers cette intervention, la Pr Noujaim met en lumière le rôle déterminant et complexe du Festival de Baalbeck dans “l’émergence du théâtre libanais”, pour reprendre les termes d’Etel Adnan. Son analyse apporte un regard historique et critique essentiel sur l’influence réciproque entre les politiques culturelles d’une part et les pratiques artistiques et leurs évolutions, de l’autre.
L’IESAV félicite chaleureusement la Pr Noujaim pour cette participation prestigieuse et pour la portée de ses travaux, qui contribuent activement à l’étude et la valorisation du patrimoine théâtral libanais.