« On ne regarde pas quel métier vous tire du sommeil chaque matin avec bonheur... »

Interview de Mme le Doyen dans l'OLJ
12 Juillet 2016
Collaborateurs
  • L'Orient-Le Jour


-Interview paru à l'origine dans l'OLJ le 9 Juillet 2016 par Zeina Antonios- « Nos étudiants ont une solide culture générale qui leur permet d'être embauchés dans de nombreuses institutions », affirme Christine Babikian Assaf, doyenne de la faculté des lettres et des sciences humaines de l'USJ. Fini le temps où, une fois arrivé à l'université, on avait le choix entre les professions d'ingénieur, d'avocat ou de médecin sous peine de baisser dans l'estime de ses proches. Aujourd'hui, les métiers reliés aux sciences humaines se développent petit à petit et résistent aux préjugés. « Si tu t'inscris en géographie/lettres/philo, tu vas finir enseignant dans une école. » Combien de fois avons-nous entendu cette phrase, prononcée avec dédain. Certes, l'enseignement reste un des débouchés classiques des formations en sciences humaines. Mais il existe également d'autres opportunités de travail et de spécialisation, à travers des masters professionnels qui ont vu le jour ces dernières années. Une tendance confirmée par Christine Babikian Assaf, doyenne de la faculté des lettres et des sciences humaines de l'Université Saint-Joseph. « Quand on a des enfants, on souhaite qu'ils soient entre les mains des meilleurs enseignants possible et on peut s'enorgueillir de former de très bons enseignants à l'USJ. Il y a une très forte demande des écoles pour nos enseignants », indique-t-elle. « À côté de ce débouché classique pour les sciences humaines, notre faculté devance les tendances et affiche un réel souci de professionnalisation », précise Mme Babikian Assaf. Elle insiste sur l'importance de l'acquisition d'une bonne base en licence qui peut ouvrir de nombreuses portes en master : information et communication, gestion des ressources humaines, relations internationales, curatoriat et critique d'art, psychologie du travail... Penser la société et ses besoins « Les étudiants en sciences humaines ont une solide culture générale qui leur permet d'être embauchés dans de nombreuses institutions », indique le doyen de l'USJ qui donne l'exemple d'étudiants en relations internationales recrutés par une firme internationale en raison de leur bonne connaissance de la culture libanaise et régionale. « Nos diplômés travaillent dans les ONG et les organismes onusiens. Certains ont ouvert des boîtes de consultation. Ils ont également accès à des emplois dans la communication, le journalisme et la culture », souligne Mme Babikian Assaf. « On ne pourrait pas vivre sans les ingénieurs, les avocats, les grands financiers et banquiers mais, en même temps, nous avons besoin de personnes qui nous aident à décrypter et à comprendre comment évolue la société. Pourquoi retrouve-t-on parfois des philosophes ou des historiens à la tête d'une entreprise automobile par exemple? Parce que ce sont des gens qui ont une tête pour penser la société et ses besoins », relève-t-elle. « Les gens croient qu'on ne peut pas gagner d'argent avec les sciences humaines et que celles-ci sont limitées à l'enseignement. Mais même l'enseignement devrait être beaucoup plus valorisé en tant que métier, surtout par les parents d'élèves », poursuit la responsable. « Malheureusement, nous vivons dans une société de l'avoir et pas de l'être. On ne regarde pas quel métier vous tire de votre sommeil chaque matin avec bonheur et gratification personnelle », poursuit-elle. « Il y a beaucoup de jeunes qui réalisent que la vie, ce n'est pas seulement ce qu'on a, mais ce qu'on est et ce qu'on fait. Il existe de plus en plus de demandes sur des métiers non conventionnels, comme la musique, l'art, le cinéma, la mode. Je pense qu'il y a une certaine transformation avec la jeunesse actuelle. Il y a de la place pour tout le monde dans la société. On ne veut pas que tout le monde devienne humaniste, mais il y a une place pour les sciences humaines parce que c'est relié à des métiers », conclut-elle.