Dina el-Ahdab : des racines solides et des ailes bien déployées

Multitalentueuse, pleine d’ambitions et de ressources, Dina elAhdab, jeune doctorante à Paris, est une Tripolitaine de 25 ans très attachée à ses racines.
Samedi 25 juillet 2020
Organisateurs


Par Edward Sfeir, in L'Orient - Le Jour, samedi 25 juillet 2020.

L’histoire commence à Tripoli, au collège des Saints-Cœurs. Dina n’a alors que 18 ans, élève en classe de terminale, malgré les nombreux efforts de son père, médecin de grande renommée, pour l’orienter vers son domaine de profession. La jeune pianiste amatrice est déterminée à devenir chercheuse et croit dur comme fer à une future carrière de chercheuse en génétique. «Comme tout médecin, mon père rêvait que je suive sa voie, mais mon amour pour la recherche et surtout la génétique a pris le dessus. Je n’ai jamais postulé à aucun concours de médecine», raconte la jeune doctorante qui poursuit actuellement une thèse sur les interactions des macromolécules d’acide désoxyribonucléique (ADN). Son grand-père, son père, ses oncles, tous travaillent dans le domaine de la science: ingénierie, médecine… mais elle est la première à s’investir dans la recherche. Un choix qu’elle confie ne pas regretter. «Jamais je ne me suis dit: et si j’avais essayé tel ou tel autre métier. Au contraire, plus je m’approfondis dans le domaine, plus je réalise que j’ai effectivement fait le bon choix !» dit-elle avant d’admettre: «Par contre, et comme tout étudiant, je pense toujours à quoi faire après.»

La recherche : une passion pour la vie ! 

Et c’est ainsi que se lança son cursus à l’Université Saint-Joseph, au campus du Liban-Nord à Tripoli, où elle entreprend pendant trois ans une licence en sciences de la vie et de la terre/biochimie qu’elle décroche avec succès. «J’avoue avoir une grande appartenance à l’USJ et surtout à mon campus», affirme-t-elle. Très vite, après avoir complété ses études de premier cycle, elle quitte le cocon familial et le campus du Liban-Nord pour aller poursuivre un master à la faculté des sciences de l’USJ au campus des sciences et technologies à Mansourieh, où elle obtient un di
plôme en génomique et protéomique fonctionnelles. Pour se diriger par la suite vers Paris afin d’effectuer son stage de fin d’études à la Sorbonne, au laboratoire de chimie théorique. «J’ai adoré à la fois l’esprit génomique et protéomique, et la chimie computationnelle et modélisation moléculaire des protéines», confie-t-elle avec enthousiasme. 

«Du coup, je fais mon doctorat en cotutelle entre l’USJ et la Sorbonne au sein des deux laboratoires qui m’ont hébergée lors de mon stage de master», précise la jeune chercheuse qui poursuit ses études doctorales sur les interactions des macromolécules d’ADN et, plus récemment, sur les protéines-clefs du Covid-19. Pour Dina el-Ahdab, malgré les défis socio-économiques auxquels la recherche est confrontée au Liban, il y aura toujours une lueur d’espoir et rien n’est impossible devant la volonté. 
Elle avoue quand même que le changement reste quelque peu «primitif» et lent. «Bien qu’on me dise toujours que le Liban n’est pas vraiment fait pour la recherche et que mon destin se limitera à être enseignante à l’université, je pense toujours que tout peut changer !» estime-t-elle.

Journalisme et littérature : la seconde Dina 

Amoureuse de lecture, d’écriture et de photographie, la scientifique s’est par ailleurs forgé une carrière dans le journalisme. Elle est responsable actuellement de Campus-J, le journal des étudiants de l’USJ, en tant que corédactrice en chef. Elle est également fondatrice et rédactrice en chef d’une publication intitulée Le Cèdre – Revue de presse de la maison du Liban à Paris. «Je ne suis pas issue d’une école de journalisme, je l’avoue», concède-telle en soulignant le peu d’intérêt des scientifiques en général pour l’écriture et en dénonçant «l’immense vague de fake news observée avec la pandémie du coronavirus, chacun se prenant pour un spécialiste ; surtout au Liban». La jeune femme pointe du doigt l’absence de spécialisation chez les journalistes ainsi que le manque de coopération de certains spécialistes qui gardent leurs informations pour leurs collectivités.

En plus du journalisme, la littérature est un des points forts de la jeune chercheuse. «Mes écrits sont souvent centrés sur la science ainsi que sur la politique». Elle avoue aussi écrire des textes assez mélancoliques, un style auquel elle trouve du charme. «J’adorerais écrire un roman, j’y pense chaque jour ! Je voudrais par-dessus tout aborder le sujet de Tripoli et braquer la lumière sur son charme ainsi que sur le charme du Liban, et les comparer à d’autres pays du monde que j’ai visités, surtout que voyager est l’un de mes passe-temps favoris». Et du côté de la lecture, outre les ouvrages scientifiques, Dina el-Ahdab apprécie beaucoup les romans policiers. «Mon livre favori ? Impossible de me décider ! Chaque œuvre a son charme et des saveurs propres à elle.»