Message du Pr Salim Daccache s.j., Recteur de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth

Septembre 2020

Au vu de nos multiples crises, surtout celle provoquée par l’explosion du port et de toute une ville le 4 août 2020, nous souffrons certes de la perte de chers disparus, des parents d’enseignants, d’étudiants et d’anciens étudiants de notre université, des multiples blessés,

Mais nous souffrons plus du manque d’Etat, ou de ce peu d’Etat agité qui au lieu de soulager, nous malmène et souvent nous étouffe.

Nous ne saurons aller dans la voie du simplisme, ni du dramatisme. Parlons plutôt de nos priorités :

1) Restaurer les lieux de notre patrimoine matériel et immatériel, restaurer les chez soi, redynamiser les infrastructures de notre système culturel et éducatif, une tâche parfois surhumaine mais la base de tout salut. USJ en mission (les Clubs de la vie étudiante, le 7e jour, l’Aumônerie, les sportifs, le cercle du personnel administratif, …) a montré et montre la voie de cet engagement pour la vie.

2) Motivons-nous les uns les autres, nous les membres de notre communauté universitaire : les étudiants, les enseignants, le personnel, etc., dans les moments difficiles comme les nôtres, la tendance est la survie et peu la qualité. Or notre salut est de maintenir le cap de la qualité dans les études mais aussi dans tout ; notre salut réside aussi dans l’excellence de bien faire.

3) Créons des espaces physiques ou virtuels où il est bon de vivre et de travailler ; que les responsables et les membres de ces espaces veillent à l’écoute mutuelle, à l’empathie, à la solidarité, afin de lutter contre toute menace extérieure. Si l’empathie manque entre nous, nous ne pourrons jamais contrer le danger extérieur, car chacun de nous sera occupé par la lutte contre son voisin du groupe.

4) Nous ne voyons pas le bout du chemin ni le but de notre marche. Il est vrai que nous sommes dans le tunnel de l’obscurité. C’est justement dans ce cas que nous devons rester en chemin ; nous continuons notre marche même si nous ne voyons pas encore la lumière ; mais nous croyons qu’elle viendra car notre marche est un acte optimiste ; la résistance et la résilience c’est demeurer malgré tout en marche et s’engager ensemble, cœurs et esprits unis, pour un meilleur avenir.

5) L’un des objectifs d’une université comme Saint-Joseph de Beyrouth est de former les compétences d’à venir. C’est notre destin de continuer notre mission, la formation des talents de demain, talents d’exception, des citoyens du nouveau centenaire du Grand Liban…La dynamique lancée par la Fondation USJ pour la levée de fonds porte quelque part ses fruits, mais tant pour l’Université que pour l’Hôpital, les besoins sont si grands et le souci d’affronter les besoins exige de nous tous d’être de partenaires de la Fondation.

6) Nous souffrons du manque d’Etat, surtout celui qui nous est semblable. La voix de la révolution du 17 octobre sinon son message tonnera toujours : c’est reconstruire l’Etat des libertés citoyennes, de la justice et de la vraie convivialité. C’est avec chaque croyant au Liban, même différent que cela se fera/

Année 2020/21, année difficile mais de tous les possibles surtout le possible qui ouvre la voie à de réelles réformes et à la construction de la communauté. Ce Libanais qui a tant aidé d’autres sociétés à construire leurs espaces vitaux, n’est-il pas capable aujourd’hui de se soulever contre l’ancien homme et à revêtir le Liban de son nouveau vêtement de lumière ?

Salim Daccache s.j.