"Forum à l’USJ sur l’Audit juricomptable :

Vers un Etat de transparence et de responsabilité ?".
Mardi 15 décembre 2020

Dans le cadre des activités du Forum de la bonne gouvernance, l 'Observatoire de la fonction publique et de la bonne gouvernance (OFP) de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ), en collaboration avec Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS), a organisé, le mardi 15 décembre 2020, un colloque intitulé « L’Audit juricomptable : Vers un Etat de transparence et de responsabilité ? ».

Dans son discours de bienvenue, le directeur de l’OFP, le professeur Pascal Monin, a estimé que « l’audit juricomptable de la Banque centrale du Liban revêt une grande importance dans le cadre des reformes incontournables attendus, pour dévoiler les faits à l'opinion publique et définir les responsabilités et infractions devant mener les responsables devant la justice. » Il a ajouté: « Il va de soi que cet audit devrait inclure tous les ministères, administrations et institutions publiques, dans l'espoir que cela fournira l'occasion de savoir comment et où l'argent public a été dépensé ou detourné, et si les règles et principes juridiques et de transparences ont été respectés dans les dépenses et la gestion de l'argent public. »

Monin a remercié le recteur de l’USJ, d'avoir soutenu l'OFP dans tous ses projets universitaires et nationaux œuvrant avant tout pour le bien du Liban, promettant de poursuivre dans cette voie « jusqu'à ce que les reformes soient entreprises et que nous puissions parvenir à l’instauration de la bonne gouvernance publique, car avec ce type de gouvernement, et avec lui seulement, que se trouve le salut du Liban. »

Dans le cadre de la conférence, l'ancien directeur général du ministère des Finances, Alan Bifani, a révélé que l’on ne connaissait pas « les comptes de la Banque du Liban, et que c'est l'un des grands paradoxes dans ce pays où existent toujours des « formes de protectorats » qui sont encore interdits à l'Etat ». Il a ajouté: « Je suis heureux de parler d’audit juricomptable, car cette question a été inscrite dans le projet de budget en 2017, et n'a pas été débattue, tout comme en 2018… ». Concernant le plan de réformes élaboré par le gouvernement, Bifani a souligné que "la communauté internationale l'a loué alors qu'il était combattu au Liban, parce que personne ne veut de réformes ou agir face à la crise économique actuelle".

Il a ajouté: « Au lieu d’engager les reformes salvatrices, « ils » ont proposé un plan alternatif pour couvrir les pertes par les biens publics et geler les dépôts et avoirs des déposants, ce qui signifie un " haircut " terrifiante qui peut durer 20 ans. Ce plan, ajoute Bifani, s’avère être une mascarade." Concernant l'audit, il a rappelé l’importance du travail déjà accompli « mais il y a ceux qui ne veulent pas voir ce dossier aboutir, soulignant que la Banque du Liban est indépendante dans sa gestion certes, mais qu’elle est la propriété de l'État après tout et, si elle subit des pertes, c'est l'État qui doit la renflouer. »

À son tour, l'ancien ministre Ziad Baroud a estimé qu’« il y a une réticence politique à ne pas procéder à un audit juricomptable", ajoutant: "Il existe des lois exécutoires qui doivent être suivies et appliquées et nous n'avons pas besoin de nouvelles lois ". Il a poursuivi: "Je parie sur le pouvoir judiciaire, et je suis d'accord avec la publication automatique du contrôle juricomptable, mais nous devons utiliser ces informations légalement, et au sein du pouvoir judiciaire il y a des règles concernant les pouvoirs et la juridiction." Baroud a estimé qu’« en plus du contrôle judiciaire, il existe un contrôle populaire qui ne peut se contenter de demi solution, mais exige plutôt des réponses adéquates et satisfaisantes. »

L'ancien député Ghassan Moukhaiber a affirmé que « le travail du Parlement et de toutes les institutions de contrôle, n'était pas suffisant pour ce qui est du recensement et du contrôle de l'argent public et sur quelle base il a été dépensé ». Et d’ajouter que « ce rôle de contrôle est entravé par le système politique et la classe dirigeante, en raison des lacunes des institutions ou de l’inefficacité de certaines d’entre elles ».

Moukhaiber a estimé qu'il n'était pas étrange que le Liban se transforme en un pays corrompu parce que tout le monde est impliqué, et qu'il n'y a aucun intérêt pour qui que ce soit à révéler des dossiers de corruption, soulignant que ce qui se passe actuellement avec le sujet de l’audit juricomptable est un mensonge à l’encontre du peuple libanais.

Le juge Dr. Rana Akoum a expliqué quant à elle, le sens et l’importance de l’audit juricomptable et le fait que de nouvelles lois aient été adoptées pour lever le secret bancaire, et comment gérer le contrôle pénal d'un point de vue juridique.

Il convient de rappeler que, dans le cadre de sa politique visant au renforcement de la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption dans les secteurs public et privé, l'OFP en coopération avec Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS) vient de lancer le « Forum de la bonne gouvernance » : plateforme de réflexions, de débats et de recommandations pour la consolidation de la bonne gouvernance et ses enjeux impliquant les chercheurs, les responsables, les décideurs, la société civile et les médias. A cet occasion le recteur de l’USJ, le Pr Salim Daccache a rappelé que « le peuple libanais, aspire aujourd'hui à un État capable d'assumer ses responsabilités et de fournir à ses citoyens, ce qui est mis à la disposition de tous les peuples des pays du monde démocratique en ce qui concerne les composantes de la bonne gouvernance, tels que l'État de droit, la responsabilité, l'intégrité, la transparence et l'accès à l'information ». Quant au rôle de l’USJ dans la promotion de la bonne gouvernance, le Pr Salim Daccache a précisé que « les Jésuites et l'Université Saint-Joseph de Beyrouth ont cru aux principes de la bonne gouvernance, ont jeté ces bases dans leurs performances et leurs comportements, et ont travaillé à les diffuser, en particulier parmi les étudiants et les jeunes, afin de leur fournir les moyens de construire leur avenir et celui du Liban. La mise en place de l'OFP cristallise la volonté de l'université de proposer des réformes fondamentales du système, et un changement de ses pratiques destructrices qui poussent les jeunes à émigrer », conclut-il. Signalons que la première conférence du forum a abordé « la réforme de la loi sur les marchés et achats publiques publics comme base d'une bonne gouvernance » …

Créé en 2015, l’OFP vient soutenir toute initiative visant à favoriser la bonne gouvernance, dans ses volets politique, institutionnel et administratif. L’OFP entend ainsi agir en faveur des principes démocratiques de l’État de Droit, de la transparence, de la lutte contre la corruption et de la citoyenneté, depuis le cercle académique que constitue l’USJ, dont la tradition a de tout temps contribué à développer ces valeurs au Liban et qui continue d’être un lieu de débat intellectuel et politique, ouvert à toute la société.

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