Interview avec Hiba Zafran

Dès les premiers pas de l’IET
Lundi 18 octobre 2021
Organisateurs


Hiba Zafran, PhD., ergothérapeute-psychothérapeute et professeure à l’Université de McGill a participé au démarrage de la formation à l’IET pendant sa première année d’ouverture en 2016-2017. Nay el Hajj étudiante à l’IET l’a interviewée le 18 octobre 2021 pour cette première édition de ErgoBulletin. 

Professeure Zafran parlez-nous de votre cadre de travail 
Je suis ergothérapeute et psychothérapeute multi migrante, résidente au Canada. J’interviens surtout auprès des jeunes et jeunes adultes (14 à 30 ans) de la communauté LGBTQ et des victimes de racisme en santé mentale dans le cadre de mon cabinet. J’effectue aussi des travaux de recherche et depuis 2017, je m’implique auprès de la population autochtone au Canada et les iniquités dans les soins de santé. 

Comment êtes-vous parvenu à l’IET sachant que vous êtes installée à Montréal ? 
Tout a commencé par coïncidence ! j’ai appris de la part d’une collègue à propos de la collaboration entre l’USJ et l’UdeM pour la mise en place d’une formation en ergothérapie à l’USJ. Comme je comptais passer mon année sabbatique à Beyrouth avec ma famille, j’ai été mise en contact avec Mme Carla Matta Abizeid Directrice de l’IET et l’histoire a commencé ! 

Parlez-nous de votre année passée à l’IET 
Lorsque je suis arrivée à l’IET, le programme avait été déjà élaboré avec UdeM et Mme Abizeid avait déjà entrepris le travail de base pour identifier les besoins en ergothérapie au Liban. […].  
Nous avons en premier, développé les cours de première année et mis les bases de l’ergothérapie dans le contexte libanais. Il est bien évidemment impossible de reproduire le même enseignement à Montréal et à Beyrouth […]. Le deuxième élément que nous avons ciblé avec Mme Abizeid est celui des praticiens et leur milieu de travail. Pour cela nous avons pris le temps avec les ergothérapeutes pour repérer les lieux où la pratique était déjà solide pour les stages et pour rencontrer des ergothérapeutes qui pourrait constituer l’équipe d’enseignants. […] Troisièmement, il était important de mettre en place un programme de formation continue pour ces ergothérapeutes comportant deux volets : un volet pédagogique : comment enseigner, quelles sont les meilleures approches d’enseignement... et un volet d’actualisation des connaissances sur l’ergothérapie, ses bases conceptuelles, le raisonnement clinique […]. Ceci va permettre de renforcer l’ergothérapie au Liban pour qu’elle se distingue des autres professions. […]  
Enfin nous avons entrepris Mme Abizeid et moi-même une étude ethnologique focalisée sur l’émergence et la pratique de l’ergothérapie au Liban afin de dresser le portrait de la pratique au Liban et identifier les besoins en services d’ergothérapie afin de mieux définir les orientations du programme à l’USJ.  
Cette expérience a été très enrichissante pour moi tant au niveau académique que relationnel. Participer au développement d’un programme de formation et contribuer à l’évolution d’une profession constituent, surtout au Liban, un très beau défi. Cette année passée au Liban a également permis de forger des liens avec les personnes que ce soit les étudiants ou les nouveaux enseignants.  

Y a-t-il des évènements marquant de votre passage ? 
Il s’agit d’une expérience que j’ai vécu avec la promotion 2020 : les étudiants viennent d’un cadre scolaire où l’enseignant donne son cours et les étudiants reçoivent l’information et j’avais beaucoup de difficulté à défaire ce cadre et encourager les étudiants a explorer les concepts sans s’attendre à des réponses en noir et blanc.  […]. Pour donner le cours sur les entrevues, nous nous sommes installés sous un arbre dans le jardin du Campus. Et là, tout ce cadre formel n’était plus là, les étudiants se sont libérés et ont pu s’engager dans le cours a un plus haut niveau de curiosité. C’est ça l’ergothérapie ! […] on peut préparer la meilleure activité, mais si on n’arrive pas à avoir l’engagement du patient, c’est qu’on n’a pas fait ce qu’il faut en tant qu’ergothérapeute. 

Quelle est votre vision future de l’ergothérapie au Liban ?
Je dirais qu’il faudra œuvrer pour que nos soins soient pris en charge par la sécurité sociale et les assurances. Et définitivement la mise en place d’un Master et ce, pour avoir la possibilité de mettre en place des travaux de recherche. Bon nombre d’ergothérapeutes font tellement de choses créatives pour surmonter les problèmes […]. Je trouve qu’on a beaucoup de savoirs non-partagés qui pourraient être bénéfiques à tous. Enfin, je dirai que pour moi, l’IET est surtout un lieu d’espoir pour la profession car la vision de l’ergothérapie qui est promue vise l’excellence et l’innovation.